"Malgré les grands progrés que je fais en allemand, il est clair que j'y suis venu trop tard, et que je ne parlerai jamais cette langue comme le français. Je ne le regrette pas trop". Michel Tournier, "Le Roi des Aulnes".

29 janvier 2007

L'ordre juste à Paris, c'est juste

Saut de puce à Paris ce week-end pour m'assurer que tout était bien en ordre: la presse française ne parle que de Sarkozy et de Royal, la circulation n'a jamais été aussi pénible dans les rues de la capitale et mes anciens camarades de jeu du bon vieux de temps de la rue Rollin (l'Iep à Lyon) n'ont pas changé, sauf qu'ils font des enfants et voteraient presque pour Bayrou.

S'agissant de la circulation à Paris, il y aurait de savantes notes à écrire. L'éradication, ou tout du moins l'exclusion complète de la voiture du centre de la ville, me semble un moindre mal. Question d'hygiène. Récemment, une tribune dans Libé hurlait sur la politique conduite par la mairie. Ils tuent Paris... écrivait l'écrivain. Faut rien exagérer.

Au fait, Thibaut et Thomas, vous allez pas voter Bayrou, hein ? Eh, faîtes pas les cons, c'était une blague, c'est ça ? C'était pour me faire une farce ? Pour réveiller le militant qui sommeille depuis 2002, c'est bien ça ? Eh...


23 janvier 2007

Justice militaire et justice niçoise

Gastro-entérite et retard des chemins de fer allemand ont en commun d'offrir à leurs malheureuses victimes de longues plages de lecture. Ayant par nature l'estomac fragile et voyageant chaque jour sur la Bahn, l'occasion m'est régulièrement donnée de revisiter la bibliothèque du salon. Les récentes livraisons nous emmènent - c'est étonnant - sur les traces de la Justice, de la politique et de l'éthique.

Débutons par un ouvrage qui est trop rarement cité parmi la bibliographie relative à Mendès France et qui relate son procès à Clermont-Ferrand en 1941. Jean-Denis Bredin retrace dans "Un tribunal au garde-à-vous" les derniers jours de la IIIe République, l'exode vers Bordeaux et la mise en place du régime de Vichy. Le regard de l'avocat-écrivain sur la procédure pénale dirigée conjointement par l'armée française et l'Etat français contre Mendès France offre une description technique et romanesque de faits historiques bien sinistres. L'exemple du procès de Mendès permet au lecteur de mieux appréhender la réalité de Vichy et la psychologie de ses acteurs. En refermant le livre, on ne peut s'empêcher de s'interroger sur l'avenir des magistrats de Clermont-Ferrand à la Libération et sous les Républiques suivantes.

Autre temps, mais pas forcément autres moeurs. C'est en substance l'enseignement qu'il est possible de tirer du livre Document (ainsi que l'éditeur le désigne en couverture) d'Eric de Montgolfier, tour à tour procureur à Chambéry, à Valenciennes puis à Nice, coupeur de têtes (Tapie, Johnny, les francs-maç'), incarnation de la droiture de la magistrature et de son indépendance.

L'incorruptible met le lecteur en garde immédiatement : il n'est pas écrivain. Il conviendra de lui pardonner pour ne s'intéresser qu'au fond de ses propos et de sa pensée. On sent très vite que l'homme s'apprécie et la plume s'en fait sentir, relatant ses exploits judiciaires, ses prises de position courageuses, forcèment, son indépendance d'esprit, son indépendance et son refus de la soumission hiérarchique.

On lui pardonne vite car de Montgolfier convainc tout aussi vite son lecteur de la justesse de son propos et de son analyse. "Le devoir de déplaire" devrait assurément faire partie des lectures obligatoires à l'entrée de l'Ecole Nationale de la Magistrature.


09 janvier 2007

Fünf Dinge, die Sie vermutlich von mir nicht wissen

Toujours à la pointe de la blogosphère, tel notre phare dans l'océan obscur du net, Arnaud Meunier - dont l'éloge dans ces pages n´aura que trop insuffisamment été célébré - nous rappelle combien les bloggeurs forment une seule et même communauté (cela est écrit non sans arrière pensée, tant notre homme abhorre le thème de communauté du net).

L'ancien camarade scout de la Croix-Rousse m'invite à dévoiler "5 choses que vous ne saviez probablement pas à mon sujet", avant de passer le relais à 5 autres bloggeurs, etc. Arnaud s'est bien sûr prêté au jeu. Il aurait peut-être pu préciser qu´il avait collé des affiches pour Robert Hue à Sc Po Lyon, mais c´est vrai que tout le monde est déjà plus ou moins au courant.

La chaîne semble ainsi remonter de blogs en blogs, tout droit sorti d'un esprit enfûmé dans un bar du vieux San Francisco. En parlant de San Francisco, j´ai entendu ce matin en voiture une chanson de Gérard Lenorman, "Pour un flirt, etc". Commentaire de l´animatrice allemande : "Au fait, c´est quoi, un flirt ? Un jeu où l'on ne sait pas si on est encore au stade des qualifications ou déjà en final". Que de souvenirs. En voilà 5 autres:

1. J´ai serré deux fois la main de Lionel Jospin (la gauche en 1995 à Quetigny, la droite en 1997 à Strasbourg), une fois celle de Laurent Fabius (le droite à Grenoble en 2000).

2. J´ai déjà participé à 6 courses à pied de dix kilomètres (Mâcon deux fois, Dijon, Le Creusot, Beaune, Saint-Appolinaire). Toujours en des temps que j´ai personnellement jugés raisonnables, mais qui faisaient bondir mon grand-père, champion de Bourgogne de course à pied sur 5.000 et 10.000 m (il a battu Mimoun à Genève, respect).

3. Mon père était parachutiste. Il a été envoyé en mission comme casque bleu au Liban, au Tchad, pour faire respecter les lois internationales et libérer les peuples asservis de leurs chaînes. Il a une toute autre version de son Histoire, mais je préfère retenir celle-là. Ce "paramètre" m´a conduit deux années à Djibouti, sur la Corne de l´Afrique.

4. Je me surprends parfois à penser que la LCR a raison.

5. J´aimerais bien m´y connaître un peu plus en informatique. Malheureusement, malgré d´indéniables efforts, j´ai lâché prise avec le monde informatique depuis Atari et le TO7.

A mon tour désormais d´adresser un appel à poursuivre cette chaîne à 5 bloggueurs (-ses). Citons : Marie-Agnès, Régis Juanico, Benoît Hamon, Maître Eolas et Philippe Bilger.

08 janvier 2007

Sie sind Koch

Au hasard d'un clic ce jour sur le web allemand, je tombe nez-à-nez avec un test en ligne à réaliser en quelques secondes. Le site du Süddeutsche Zeitung propose un avant-goût de l'Einbürgerungstest servi aux candidats à la naturalisation allemande par le très libéral ministère de l'Intérieur de Hesse.
Une parenthèse géopolitique : la Hesse est un Land occidental fort peuplé, composé de ville comme Francfort-sur-le-Main, et dirigé par un conservateur, Roland Koch, ayant trempé dans les plus sombres magouilles des caisses noires de la CDU, mais qui est malgré tout triomphalement réélu à chaque élection. Sur un plan idéologique (que d'honneur...), la politique intérieure de Koch se situe entre Chevènement et Sarkozy.
Autant dire que mes espoirs étaient grands quand les premières questions me sont apparues sur l'écran. Nennen Sie ein deutsches Mittelgebirge, Wann wurde die Bundeswehr gegründet?, Was gelang dem deutschen Wissenschaftler Otto Hahn erstmals 1938?, etc.
Je conseille aux germanistes de tenter cette expérience et à tous les curieux qui souhaitent savoir s'ils sont suffisamment cultivés pour mériter la citoyenneté allemande ... de Hesse. Pour la petite histoire, j'ai - malgré des lacunes certaines, surmontées au pifomètre - obtenu la bagatelle de 17 points sur 20. Avec ce commentaire du Süddeutsche : "Sie sind schon knapp Deutschland. Fast alles richtig gemacht, nun fehlt nur noch das Sahnehäubchen zum Top-Deutschen. Für die hessische Einbürgerung langt´s auf jeden Fall".

06 janvier 2007

C'était vraiment très intéressant

Et dire qu'il aurait pu être élu:


04 janvier 2007

Les Allemands aiment Sautet

Ne trouvant pas encore les ressources suffisantes pour expérimenter le cinéma d'outre-Rhin, je profite paradoxalement de mon exil germanique pour parfaire ma connaissance du cinéma français.

Il est vrai que les Allemands vous invitent regulièrement à revisiter certains grands classiques. La collection DVD éditée par le Süddeutsche incluait ainsi l'an dernier Les choses de la vie de Sautet, avec un petit article sympathique expliquant comment le réalisateur décrit avec talent la société française des années 70 et pourquoi Michel Piccoli n'apparait jamais sans une clope au bec à l'écran. Bel exploit artistique.

Les Allemands semblent affectionner le genre cinématographique à la Sautet. La bande de copains, les états d'âme, les relations humaines, les attitudes, les habitudes vestimentaires, culinaires,... le cinéma de Claude Sautet doit sans doute un peu incarner l'existence française rêvée et phantasmée par les Allemands.

En visionnant Vincent, François, Paul et les autres... l'autre soir, j'ai découvert un film en définitive moderne, qui doit autant à ses acteurs qu'à son (ses) histoire(s) et son esprit. La scène où Piccoli sollicite Montand et Reggiani pour obtenir des témoignages dans le cadre de son divorce doit se jouer encore fréquemment dans l'hexagone. Quand aux enfants qui mettent le feu à la maison malgré la surveillance de leurs mères...